Reportage au Cœur des Libertés allumé dans le Vercors

Dimanche 22 novembre, des montagnards ont allumé un cœur sur le plateau du Vercors à l’image des autres cœurs éclairés depuis 10 jours au Grand Colon en Belledonne et dans d’autres vallées alpines. Reportage en images lors de cette action revendicative pour l’accès à tous à la nature et contre les restrictions inquiétantes de nos libertés à l’heure actuelle.

La préparation de l’action

La préparation d’une telle action demande un minimum de préparation logistique : en effet, il s’agit d’éclairer la montagne avec une cinquante de frontales pour réaliser une forme de cœur. Un nombre réduit de personnes est prévu afin de ne pas réaliser un rassemblement important en cette période de crise sanitaire. Dans le Vercors comme ailleurs, les montagnards se coordonnent en amont, à distance confinement oblige, au travers de forums avec des messageries sécurisées (WhatsApp ou Telegram par exemple). Une fois un petit collectif réuni, il s’agit de choisir le spot adéquat pour réaliser un cœur suffisamment visible en vallée : orientation, inclinaison de la pente, possibilités d’accès, végétation,… toutes les caractéristiques du lieu sont vérifiées en détails à l’aide de photos satellites, carte, repérages si besoin sur le terrain. Le cœur est positionné à l’avance à l’aide d’une trace GPS afin de gagner du temps une fois sur place : l’espacement des éclairages de ce nouveau cœur est d’une vingtaine de mètre pour un cœur de 700m de périmètre. Mais une part importante du travail est de réunir suffisamment de frontales en un temps limité.
Enfin, l’action ayant avant tout pour but d’être médiatisée afin de faire connaitre les revendications pour un accès à tous à la nature, le collectif prend contact avec des photographes en vallée et recherche des contacts médias qui permettront de relayer les images et les revendications associées.

Vue satellite des points GPS définis pour le cœur du Vercors sur le plateau du Sornin

Le Jour J

Arrivée au Sornin dans le Vercors

Le petit collectif formé pour cette nouvelle action dans le Vercors a pu réunir assez de frontales. Plusieurs RDV sont donnés au fil de la journée afin d’installer petit à petit les frontales. Chacun arrive par ses propres moyens depuis la vallée ou le plateau (en voiture, en bus ou encore à pied) par des itinéraires différents : la règle des 1km/1h est toujours d’actualité et il faut donc limiter le risque de croiser la maréchaussée. Le collectif est cependant formé principalement de personnes disposant de dérogation et donc d’une attestation qui permettra de justifier leur déplacement : les professionnels de la montagne notamment peuvent aller librement rejoindre les sentiers afin de garder un bon entrainement.
RDV m’est donné en début d’après midi sur le Plateau du Sornin où je retrouve les premiers participants à cette action militante. Cette extrémité nord du Plateau du Vercors, labélisée Espace Naturel Sensible, est surtout connue pour son Gouffre Berger permettant d’aller 1km sous terre, première mondiale réalisée en 1956 par des spéléologues ! Ici nous sommes au grand air avec une magnifique vue sur la Métropole de Grenoble et les massifs environnants. On se trouve face à Belledonne et ce fameux sommet du Grand Colon, premier sommet à avoir été éclairé de la sorte il y a une dizaine de jours. Même si le mois de novembre est bien avancé, le peu de neige est frappant, y aura-t-il de la neige à Noël ? Et la verrons-nous uniquement depuis sa fenêtre toujours confiné entre 4 murs?

Vue depuis le Plateau du Sornin

15h – L’installation du cœur

La zone “Cœur”
Vue plus au sud sur le plateau du Vercors

Les premiers arrivés repèrent plus précisément le parcours prévu à l’aide de leur GPS et les points d’installation des éclairages. Le terrain est principalement herbeux, parsemé de genévriers. Le choix est donc fait d’utiliser, lorsqu’ils sont bien situés, les arbustes comme support pour accrocher les frontales. D’autres sont installées sur de petits cairns construits pour l’occasion ou encore sur des supports réalisés en boites d’œufs. A chaque fois, la frontale est inclinée au mieux vers Grenoble tout en évitant que l’éclairage parte vers le sol ou croise un arbre. La localisation de chaque point d’éclairage est enregistrée par GPS, il ne faudrait pas les perdre, surtout quand la nuit sera tombée !


Tout le petit groupe est désormais arrivé et les frontales sont installées. Quelques témoignages reçus des 4 coins des Alpes par des personnes en manque de nature sont lus, dans l’objectif de réaliser une petite vidéo présentant la revendication.

17h30 – L’éclairage du cœur

Juste avant la tombée de la nuit, chacun part rejoindre le cœur pour y allumer quelques frontales. En 15 minutes, le cœur est éclairé alors que le ciel s’assombrit. Depuis le cœur, certains se prennent à douter : les éclairages sont-ils suffisant, la forme est-elle réussie compte tenu des reliefs de ce terrain pas vraiment uniforme ?

Quelques frontales éclairées
Vue sur la métropole de Grenoble depuis le haut du cœur

18h – Les premières images

L’avis enthousiaste d’un photographe nous parvient cependant par message et on reçoit vite les premières images de cette création artistique éphémère. Sur les réseaux sociaux, les premières photos d’amateurs qui découvrent le cœur plus bas en vallée sont déjà partagées, et même la webcam de Chamrousse permet de le distinguer ! L’événement est ensuite relayé par quelques médias qui évoquent à nouveau la revendication de l’abolition de la limite 1km/1h pour permettre l’accès à tous à la nature.

Photo prise depuis Grenoble – Alexandre Gelin
Grenoble et le cœur – Alexandre Gelin
Vue depuis Chamrousse (Webcam)

19h : Extinction des feux

Le collectif choisit d’éteindre l’installation d’autant qu’au loin, il semble que les forces de l’ordre pourraient venir faire un tour sur cette expression artistique et militante à la limite de la légalité. Chacun aide à la récupération des frontales et rentre chez soi par son propre chemin… ou alors bivouaque sur place pour mieux profiter de ce beau belvédère.

En savoir plus

La vidéo Le Cœur de nos Libertés

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